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flonflons & musette
19 juillet 2016

14 Juillet 2016

Un jour, dans ma tendre jeunesse, j'ai vécu dans un pays en semi-guerre. La semi-guerre, c'est un concept. C'est une guerre, mais qui ne s'appelle pas/ pas encore/ plus/ toujours pas/ pas tout à fait guerre (rayer la mention inutile).

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Dans cette semi-guerre, il y avait des horreurs, des attaques, des attentats, des exactions, des violations des droits de l'homme, que personne ne pouvait ignorer. Bizzarement, j'y ai aussi découvert une solidarité , un respect, une humanité profonde, et un optimisme ( bon, aussi un grand art pour l'humour noir) rarement retrouvés depuis. 

Le hasard a fait que j'y ai rencontré mon amie D, et sa famille, M. Evidemment, moi, Miss Petunia , petite française que j'étais, fraîchement sortie des bancs de l'université d'un pays parfaitement en paix, je voulais tout savoir, tout voir, tout comprendre, tout connaître.

Quand j'ai rencontré D, elle m'a avoué ne savoir de son pays que le strict nécessaire . Dans le salon de la famille M, le présentateur du JT était tout bonnement personna non grata


 

IMG_4040 La famille M vivait dans la campagne, dans un des trois villages du pays que l'on nommait le triangle de la mort. Un endroit fort paisible... La cadette de D avait assisté à un attentat. Son oncle et sa tante avaient été tués dans leur maison, 20 ans auparavant, juste en face, un soir d'été, en représaille d'une autre tuerie. Les actualités n'avaient plus leur place dans ce foyer où l'on avait depuis longtemps compris combien on était impuissant à changer quoi que ce soit à la situation - sinon en restant humain, en gardant du recul, en savourant le présent, en regardant droit vers l'avenir ....et en n'oubliant surtout pas d'aller voir ce qui se passait ailleurs. Surtout, ne pas ressasser, surtout, ne pas se recroqueviller, surtout, ne pas s'aigrir.

 

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Du haut de mes 20 ans, l'idée était sinon saugrenue, au moins indécente: comment pouvait-on faire autant l'autruche? Comment oser ce que je pensais être alors de l'indifférence? Aujourd'hui, 25 ans plus tard, je sais que j'aurais fait exactement comme la famille M, que j'aime tant. Mourir pour des idées, d'accord, mais de mort lente. Je suis devenue une fervente partisane de la diplomatie, de la négociation et de la médiation.

 

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Ce matin, je me suis levée, tard. Quelqu'un m'a annoncé un énième attentat, toujours plus sordide, à Nice.

J'ai écouté, j'ai fait le vide, et j'ai attendu de "digérer" la très mauvaise nouvelle. Je n'ai pas allumé la radio, et comme je suis dans mon nid d'aigle des Pyrénées, je ne risque pas de recevoir les nouvelles autrement.

Mon nid d'aigle, c'est une village dans une montagne. Il y a ma maison de Heidi au milieu de la forêt, des fleurs, de la verdure, des papillons. Des maisons en ruine, des maisons presque en ruine, des maisons plus en ruine, et des maisons biscornues: un "barrejadis" de maisons imbriquées, nichées tout au creux de la montagne.

 

 

 

 

 

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Il y a des arbres, des vaches, des grillons qui font de la musique, un ruisseau et des taons qui vous piquent le cul sitôt qu'on s'approche trop près de l'eau. Il y a un petit vent d'été, des nuages accrochés au soleil, des fantômes de générations, des chevaux et des ânes, et des chiens qui braillent. Il y a un bistrot qui sert de maison à tout le monde, même aux gens de passage. Il n'y a pas grand monde, parce qu'à première vue, c'est juste un village de montagne comme celui d'avant ou celui d'après. Alors les touristes n'ont pas l'idée de s'arrêter . Pourtant, il y a la forêt qui nous enveloppe et nous prend dans ses bras.

Pas besoin de regarder la télé en boucle Pas besoin de surfer sur ce "buzz" de la guerre, dont mes amis de la semi-guerre d'il y a 20 ans avouaient honteusement se  nourrir. Pas besoin de connaître tous les détails. Pas besoin de tout ça pour penser à tous ceux qui ont perdu le fil de la vie le soir du 14 Juillet. Pas besoin de tout ça pour communier avec tous ceux qui restent.

 

 

IMG_4046 Pour moi, faire l'autruche, me lover dans les bras de mes montagnes, rester loin, très loin, loin de la colère et de l'angoisse, loin de la potentialité de devenir aigri, loin de la rancoeur, loin du voyeurisme, dans mon petit village de rien du tout, dans lequel je ne suis que de passage, parce qu'il était là avant moi et qu'il sera là après, c'est le meilleur hommage que je puisse rendre à toutes ces vies qui sont parties avant l'heure. Compatir, et souhaiter, tout faire, pour que si possible  jamais aucun des miens ne subisse ça, et surtout, surtout, ce qui serait presque pire, pour que jamais aucun des miens ne commette ça. Et vivre, vivre beaucoup, tant que la vie nous donne du répit.

 


 

Once in my tender youth, I lived in a war-like country. A "War-like" country is a concept. It is not/ not yet/ not anymore/ still not a war.

IMG_4063This war-like "siteeation" meant horrors, bomb attacks, killings, which no one could ignore. Strangely enough in this context, I also discovered solidarity, respect, humanity and optimism (along with a very black humour...!) . I happened to meet my friend D and her family M in this country.

I was then a young French Girl, straight out of university, who wanted to know, see, learn, understand everything. When I met D, she confessed knowing very little about her own country. In the M family's living room, the TV news presenter was simply "personna non grata". The M family was living in the country, in one of the 3 villages locally known as the death Triangle.....D's younger sister had attended an attack. Her uncle and aunt had been shot to death in the house just opposite the road, in the 1970's. TV news were just unwanted in this house, where everybody had long understood how powerless they were in changing anything to the "siteeation"- apart from being as human as possible, enjoying the day to the full, and watching straight ahead to the future.. without forgetting to have a look at what was happening abroad, and how life was going on elsewhere.

Most of all, never to keep banging on about things, never to wither, never to get bitter.

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In my naive 20's, the idea appeared weird, if not indecent: how could some people choose to bury their head in the sand? How could they dare to be so "indifferent" to what was happening in their own country?

25 years later, I do know the M family was right. I know now I would have done the same. To die for ideas, right so, but slowly please, said our French singer. Over the years, i have become a strong militant for diplomacy, negociation and mediation.

 

 

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Today, i woke up, late, to the news of the day. Some one around told me about yet another attack, Even grimmer than the previous ones, in Nice this time.

I listened, stunned, I emptied my head, took a wee while to try and "digest" the news. I refused to turn the radio on. And as i am in my Pyrenean eyrie, no chance to get any news any other way.

 

 

 

IMG_4092My eyrie is a village in the mountain. There is my wee Heidi house, flowers and green and butterflies. There are derelict houses, and almost derelict houses, and former derelict refurbished houses, weird houses, new houses, a whole muddle of intertwinnned homes nestling in the heart of the mountain.

There are trees and cows, crickets for music and the odd brook with horseflies stinging your arse when you get too close to water in summer time. There is this light summer wind, ghosts from past generations, horses and donkeys, and barking dogs of course.

 

 

 

There is a bar which is home to everyone, even passers-by. That being said, don't expect a crowd:, at first sight this is just your usual mountain village, just like the one up the road or the one down the road. Tourists do tend towards first sight, so they generally drive past without stopping. Which is just as fine, when you come to think about it.....There is the mountain and the forest to envelop and embrace those with a second sight....

 

IMG_4066No need to watch TV for hours on end. No need to surf on this "war-like" buzz - which my friends in the "war-like" country shamefully confessed to get high on 20 years ago...

No need to know every detail. Only to think about all those who lost the thread of life last night. Only to be as one with those who remained;

I do need to burry my head in the sand, to nestle into my mountain's embrace, far, far away from anger, bitterness, fear and voyeurism . Far, in my meaningless mountain village , in which i am myself a passer-by: the village was before me and will remain after me.

 

That is the best tribute i can pay to those who left too early last night. To sympathise, just to hope and do all I possibly can for it never to happen to my dear ones, or, worse still, for none of my dear ones ever to commit such an act. Because this man must have been dear at some stage to some one, some day...

In the end, to live, to enjoy life, for as long as it allows us to.

 

 

 

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